Combien d'obstacles devons nous sauter dans la vie?
LE PARADIS
En vérité, je vous le dis: Le paradis, ce n’est pas aussi bien qu’on nous l’avait dit.
Ce qui est vrai, c’est ce tunnel, ce halo de lumière douce. Sauf que vous ne le voyez pas vraiment. C’est plutôt une sensation, une impression, enfin, quelque chose au niveau du ressenti, quelque chose comme ça… pas vraiment vrai, en somme.
De fait, je ne voyais rien, n’entendais rien. Pas de douleur, ça, c’est plutôt bien, mais pas de plaisir sensuel non plus : plus de caresses, aucun parfum…Rien !
Moi qui les aime tant, les caresses, les parfums, la musique, j’en ai été privé.
Pour le reste, les contacts avec les âmes ( ou purs esprits ) c’était plutôt sympa. Nous communiquons par télépathie, au paradis. Le plus difficile, au début, c’est de sélectionner les millions d’ondes télépathiques qui s’entremêlaient en permanence ; On finit par s’y faire.
Nous autres, les purs esprits, n’avons pas de forme, pas de contour, pas de réalité spatiale. Nous ne sommes rien, pas la plus petite particule. Pourtant nous existons. Nous sommes infinis, mais ni infiniment grands ni infiniment petits : nous sommes indéfinissables !
Tout ce que nous entendions, tout ce que nous voyions, tout ce que nous ressentions avant, quand nous étions vivants, tout cela est remplacé par une perception parapsychique globale.
Au début, l’âme est égarée ; Elle ne perçoit guère que ce vague halo de douce lumière, et une gigantesque cacophonie, un brouhaha infernal ( pardon, on ne doit pas dire « infernal » en parlant du paradis, cela ne se fait pas ).
Enfin, on se retrouve très vite en grandes conversations avec n’importe qui, au sujet de n’importe quoi ; Qu’importe, d’ailleurs, puisque ça ne sert strictement à rien ! Le pur esprit est inutile. Totalement, irrémédiablement inutile !
C’est ce qui m’a le plus agacé, je dois l’avouer : Les plus âgés d’entre nous ( certains, rendez vous compte, sont vieux comme Mathusalem ! Et peut être même plus !) Les plus vieux, donc les plus sages en quelque sorte, parlent pour ne rien dire, comme cela, par habitude, parce que quand on est entre soi, il faut parler, et même si l’on a rien à dire, il faut parler quand même !
C’est comme ici, somme toute, au paradis, l’essentiel est de communiquer: Nous n’avons strictement rien d’autre à faire.
Certains prétendent communiquer avec les vivants : Va savoir ! les purs esprits deviennent facétieux en vieillissant , l’un d’eux m’a dit :
« l’éternité, c’est long et ennuyeux, surtout vers la fin ! »
Les âmes n’ayant pas de moyens d’identification entre elles, se présentent par leur noms de vivants. J’ai ainsi « rencontré » feus mes grands-parents, oncles, tantes, amis mais aussi, au hasard, des gens célèbres et de parfaits inconnus.
Et, me direz vous, Dieu, dans tout cela ? Et bien, personne au paradis, ne semble douter de son existence mais nous n’avons eu aucun contact avec lui, aucun élément révélant sa réalité : Qu’il existe allait de soi, puisque nous nous trouvions dans cet état ! Mais il ne communiquait pas avec nous. Sans doute n’en a t’il pas besoin ? Il n’y a pas eu de jugement « dernier » non plus. Jamais nous n’avons entendu parler de purgatoire ni d’enfer, ni, d’ailleurs, de paradis !
Je devrais remplacer « paradis » par « au-delà » . La notion de paradis est propre aux vivants mais de fait, nous allons tous dans l’au-delà, tous, que l’on soit bon ou mauvais, artiste, grand ou petit, honnête, ou criminel, on se retrouve ensemble, et, miracle, tout le monde s’aime ! Tout est amour, dans l’au-delà, c’est l’égalité dans l’amour le plus pur, sans restriction, sans différence entre hommes et femmes, ex petits, ou gros, belles ou laids, tout le monde s’aime, vous dis-je !
En me réveillant, ce matin, je buvais mon café sur la terrasse en contemplant le halo de douce lumière qui irisait le sommet des Pyrénées ; Deux mésanges se chamaillaient pour un morceau de pain que je leur avais lancé ; Je me souvins tout à coup de ce que m’a dit tristement le dernier à m’avoir « parlé » :
« Ils m’avaient dit : « Si tu fais ce qu’on te dis tu iras au paradis ; Dirige l’avion sur la tour. Ils m’avaient promis soixante et onze vierges…..Ils m’ont menti, mais, bah ! qu’en aurais-je fait, sans mon corps ? »
Non, vraiment, l’au-delà, c’est pas le paradis !